A la 27e Région, vous le savez, les connaissances et les propositions qui naissent de nos projets sont destinées à être partagées avec tous les acteurs publics, dans une logique de communs. Avec tous les acteurs publics, pas uniquement nos adhérents donc …
Et pourtant, depuis la création de l’association, en 2011, la 27e Région a bien des adhérents. Adhérer à la 27e Région, c’est tout sauf avoir sa carte de membre, celle qui donne des avantages exclusifs sans qu’on ait rien à faire. Adhérer à la 27e Région, c’est participer à ses orientations et ses réflexions, et prendre soin de cet outil commun en garantissant la pluralité de ses financements. C’est aussi un premier pas vers la réalisation de projets ensemble, dans le cadre de nos programmes de recherche-action.
Mais en près de 15 ans, tout comme nos thèmes de travail, nos modes d’actions ou la composition de notre équipe, la relation avec nos adhérents a changé, elle s’est enrichie et consolidée. Et alors que les tensions toujours accrues sur les budgets des collectivités nous font parfois craindre une érosion de ce précieux modèle, on s’est dit qu’il était temps d’ouvrir le capot sur ce qu’est, et a été, la nature de ce lien particulier …
Des débuts placés sous l’égide des Conseils régionaux
Dès notre création, l’un de nos principaux défis a été de sortir d’une logique client/fournisseur et d’établir plutôt une relation équilibrée, réellement partenariale et s’inscrivant dans le long terme avec les collectivités. Ça peut nous paraître loin aujourd’hui, mais ce sont les présidents de Régions eux-mêmes -Alain Rousset, Jean-Yves Le Drian, et plusieurs autres- qui ont soutenu les premiers la 27e Région et formé à l’époque son tour de table ! Leur soutien nous a permis de nous positionner comme partenaires plutôt que prestataires, ce qui a facilité le dialogue avec les administrations et les grands opérateurs de l’État, et nous a ouvert plus facilement les portes pour mener nos premières expérimentations dans des lycées, des gares ou des quartiers.
Un système d’adhésion pour incarner la relation partenariale
Pour asseoir ce positionnement partenarial, nous avons fait le choix de nous situer hors du champ commercial en ne réalisant aucune prestation et en ne répondant pas à des appels d’offres, avec un système d’adhésion sur cotisation pour les collectivités et les administrations. Les premières années, nos adhérents, ce sont donc une dizaine de Régions (il y en avait 26 à l’époque), et l’essentiel de nos relations se tisse dans les projets que nous menons ensemble dans le cadre de nos premiers programmes, Territoires en Résidence puis La Transfo, dont le financement repose encore en partie sur l’ARF (Association des Régions de France), la Caisse des dépôts et des financements européens.
Une diversification de nos adhérents à partir de 2015
C’est à partir de l’expérience en demi-teinte d’un consortium État-collectivités autour de Réacteur public et de la refonte de notre gouvernance en 2016 que le cercle de nos adhérents s’élargit et se diversifie. Il s’ouvre à d’autres échelles de collectivités (Départements, Villes, Métropoles et agglos), mais aussi à des établissements publics et à des services de l’État, et même à toute personne souhaitant s’engager individuellement avec la 27e Région (ou simplement la soutenir). C’est aussi le début d’un fructueux partenariat au long cours avec le SGMAP (Secrétariat général à la modernisation de l’action publique) et la DITP (Direction interministérielle de la transformation publique) qui lui succède.
En 2017, nous comptons une vingtaine d’adhérents et leur nombre croit régulièrement jusqu’à atteindre 35 à 40 institutions adhérentes ces dernières années. Avec cette progression, notre activité d’animation d’une communauté d’agents et de centre-ressources se développe. Des formats nouveaux sont testés, à l’image de Sonar, un cycle d’ateliers organisé avec France urbaine pour aider les Villes et les Métropoles à dessiner leur propre trajectoire d’innovation, ou d’une journée pour croiser les expériences et les questionnements d’un groupe de Départements pionniers de ces démarches. Souvent, à partir de besoins identifiés avec nos adhérents, nous publions des ressources partagées, sous la forme de guides, d’anti-manuels et de conseils : pour aider les acheteurs publics quand ils passent des appels d’offres en design des politiques publiques, ou bien pour améliorer les pratiques d’assistance à maîtrise d’usage, etc. Jusqu’en 2020, Superpublic, puis les Halles civiques, facilitent les rencontres et les temps collectifs (le Covid n’est pas encore passé par là, les visioconférences ne sont pas encore légions), et offrent un toit accueillant à nos adhérents de passage à Paris …
De l’adhésion au compagnonnage
Après 2020 et ses confinements à répétition, les modes de relation avec nos adhérents se transforment. Les ateliers en visio ou en mode hybride prennent le pas sur les événements « dans la vie réelle ». Si on y perd nécessairement en convivialité et en interconnaissance, ces nouveaux formats offrent aussi plus de souplesse pour mobiliser ensemble des agents des quatre coins de la France, outremer compris. A la 27e Région, on en profite pour développer un nouveau format, celui des « webinaires adhérents », quatre à six par an, sur des thématiques variées. Ces webinaires naissent souvent d’un questionnement ou d’un début de réflexion partagé par un adhérent, et qu’on lui propose de mettre en discussion plus collectivement. Le format est simple et sans fioritures : deux à trois interventions, témoignages et retours d’expérience bien choisis (avec dès que c’est possible un apport international), puis des échanges à bâtons rompus entre les participant.e.s (jusqu’à une centaine pour certains webinaires) et, parfois, un appel à action pour poursuivre l’exploration dans les mois qui suivent. Chaque webinaire fait ensuite l’objet d’un compte-rendu détaillé sur notre blog, destiné à être largement partagé et relayé. Au fil des années, ces webinaires sont l’occasion, pour nos interlocuteur.rice.s au sein des collectivités adhérentes, de mobiliser leurs collègues d’autres services et directions et d’élargir ainsi le cercle des bénéficiaires, en interne, des ressources et réseaux de la 27e Région. Peu à peu se dessine avec nos adhérents une relation de compagnonnage, cette forme de transmission et de formation alternative, plus horizontale, fondée sur la qualité, la solidarité et la culture locale, qui transcende les organigrammes et les territoires…
Repérer et coaliser les « agents de changement »
Parallèlement à ces temps collectifs, inter-administrations, une pratique se consolide, celle des échanges réguliers avec nos adhérents dans lesquels nous jouons un rôle de veille (parfois cela prend la forme d’un temps dédié de partage de « pépites » en lien avec leurs problématiques du moment), de sensibilisation, d’orientation et de mise en réseau (avec d’autres collectivités ou organisations publiques, mais aussi avec des agences, des associations, des chercheur.euse.s engagé.e.s sur leurs sujets). Pas facile d’influer durablement sur le fonctionnement d’une collectivité comptant plusieurs milliers d’agents quand on est une petite structure externe parmi des centaines d’autres. Avec ces échanges, en marge des projets, nous cherchons à installer une relation de confiance avec des “agents de changements” situés au cœur du système, et à différents niveaux de l’organigramme. Une relation inscrite dans le temps, basée sur la réciprocité, et qui permet d’aborder des sujets toujours plus complexes et épineux.
Coopérer autour d’une œuvre commune
Au fil des années, tous ces éléments ont contribué à créer l’esprit d’une communauté de pratiques, d’un cadre protégé qui permet d’aller plus loin dans la relation, mais sans effet corporatiste, de s’entraider et de coopérer autour d’une œuvre commune, au sens où l’entend l’économiste Eloi Laurent pour qui « la coopération transforme les humains en pédagogues les uns pour les autres ». Comme l’a résumé récemment une sociologue qui travaille régulièrement avec nous, la 27e Région est quelquefois perçue comme une sorte de “port d’attache” pour quelques centaines d’agents publics et de professionnel.le.s engagé.e.s dans une « autre » transformation de l’action publique.
Les modes de relation ne sont pas figés, le renouvellement de nos adhérents, le souhait d’en attirer d’autres (notamment des plus petites collectivités), d’aller plus loin encore dans la coopération, nous invite à explorer de nouvelles voies. Qu’apporterait, par exemple, une feuille de route commune construite avec les adhérents d’un même territoire, à l’échelle régionale (dans la logique de mutualisation et de développement d’écosystèmes locaux que nous soutenons depuis des années) ?
