Le territoire, en création permanente

Posted on 5 avril 2009 par Stéphane Vincent

Petite balade du côté de la Plaine Saint-Denis ce samedi 4 avril. Je croise des gens qui convergent vers le stade de France (où Clermont va l’emporter de peu au rugby contre le Stade français, 21 à 19), et je passe de l’autre côté de la station RER ; je vais assister à l’après-midi de clôture d’un colloque sur la création et les territoires (Ethique et mythes de la création, du 2 au 4 avril) organisé dans le cadre de l’année européenne de l’innovation et de la créativité par la Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord et par le Centre d’Histoire Culturelle des Sociétés Contemporaines.

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La journée est animée par Léa Longeot (directrice de Didattica, que nous recevons le 21 avril à la Cantine) et par l’infatigable Jacky Denieul (Institut Atlantique d’Aménagement des Territoires).

Dans cette drôle de journée, dans un contexte un peu inhabituel pour moi, pleins de choses surprenantes et passionnantes.

Laboratoire communal, en Poitou Charentes.

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  Tout d’abord, je peux enfin mettre un visage sur Gabriel Lucas, directeur du Nombril du Monde, qui se tient tous les deux ans à Pougne-Hérisson, commune microscopique (mais Ô combien centrale, comme son nom l’indique !) des Deux-Sèvres. Il vient présenter le travail qu’il conduit dans le cadre de ce festival, né de la rencontre d’un artiste et d’une population il y a une vingtaine d’années. « Il faut le croire pour le voir », tel est l’adage du projet et un des fondements du projet artistique, considérant que, au delà des choses en elle-même, le plus important est le regard que l’on porte dessus.

(Au passage, toujours en Poitou Charentes mais sur un registre totalement différemment, Christine Dion du service Économique de la Région Poitou Charentes, me rappelle que c’est aussi en Poitou Charentes, à Mouthiers sur Boëme, que deux frères industriels, font parler d’eux après avoir créé une webschool en interne, en partie pour maintenir le nombre de salariés, en partie pour l’aider à se former à des usages innovants sur internet. Jean-Michel Billaut rédigé un billet sur cette entreprise, Lippi.)

L’utopie est réalisée, elle se trouve en Picardie.

Il est toujours bon de s’entendre rappeler que rien n’est vraiment nouveau, et que les idées les plus audacieuses ont déjà été mises en oeuvre. Dans un brillant plaidoyer pour « modéliser la révolution », Emile Noël, président du festival des Hivernales et vice-président de l’Institut Charles
Cros, a rapidement évoqué le projet du familistère de Guise, né du cerveau génial du patron des usines Gaudin. Insensé mais passionnant.

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Ça bouge du côté des méthodes

Décidément, il se passe vraiment quelque chose du côté des méthodes et de l’ingénierie des projets publics. Hugues Bazin et Elise Macaire vont finir de m’en convaincre.

Hugues Bazin est chercheur indépendant en sciences sociales depuis 1993, diplômé de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales en anthropologie et en sociologie. Les expressions qu’il emploie dans son travail de recherche action sur les territoires me rappelle furieusement nos premières expérimentations en résidence : il travaille sur des « parcours d’expériences », parle « d’espace réflexif », « nouvelle cartographie des lieux et des ressources humaines », « un autre rapport entre local et global, proximité et distance, public et privé, particulier et universel ».

Dans sa volonté farouche de redonner la main aux habitants sur les questions architecturales et urbanistiques, Elise Macaire (Didattica) résume merveilleusement ce qu’elle nomme « l’écosophie » : « Des associations regroupant des architectes avec notamment des sociologues, des géographes, des urbanistes et des artistes (comédiens, plasticiens,…) mettent en avant des démarches alternatives au processus traditionnel d’élaboration du projet architectural ou urbain. Elles privilégient des interventions sur les petites échelles permettant une maîtrise plus importante des habitants sur le projet. Ces collectifs réalisent un idéal de pratique démocratique qui s’appuie à la fois sur une économie des savoirs fondée sur la transversalité comme méthode d’intervention et à la fois sur une écosophie, une sagesse de l’habiter prise dans des bricolages processuels et des espaces relationnels. »

Sylvie Dallet, fondatrice de l’Institut Charles Cros, rappellera quelques invariants de l’approche créative : la culture du risque, le refus du mode binaire, l’expérience née de la rencontre, se changer en échangeant avec les autres…

Pour finir, visite de l’exposiition « Rroms : entre stéréotypes et connaissances », et chants en grec ancien… décidément, une drôle de journée…

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